Bombardement d’un hôpital à Gaza : manifestations au Moyen-Orient, la Jordanie annule le sommet avec Biden
L’armée israélienne a bombardé mardi soir un hôpital de la ville de Gaza où se trouvaient des centaines de Palestiniens blessés par onze jours de siège et d’autres personnes cherchant refuge, tuant au moins 500 personnes dans ce qui pourrait être la pire atrocité du conflit jusqu’à présent.
Des photos et des vidéos de l’hôpital al-Ahli al-Arab montrent des incendies ravageant les couloirs de l’établissement, du verre brisé et des morceaux de corps éparpillés dans l’enceinte de l’hôpital.
Des images obtenues par Middle East Eye montrent des ambulanciers et des résidents se précipitant pour soigner les blessés, parmi lesquels de nombreux enfants. Nous faisons de notre mieux pour continuer à vous fournir des informations actualisées mais la connexion internet à Gaza a diminué de près de moitié et nous avons perdu le contact avec nos correspondants sur place.
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Mahmoud Bassal, porte-parole de la défense civile à Gaza, a qualifié le bombardement israélien de l’hôpital al-Ahli al-Arab de « massacre ».
« Ce qui se passe est une punition collective. Quand est-ce que le monde défendra Gaza ? Il s’agit du plus haut niveau d’agression de la part d’Israël. Le sol de l’hôpital est couvert de cadavres et nous n’avons personne pour les ramasser », a-t-il déclaré à Al Jazeera.
« C’est un pogrom. C’est sans précédent dans l’histoire du conflit israélo-palestinien », a-t-il ajouté. « Aucune aide n’arrive via Rafah [la frontière avec l’Egypte]. Il s’agit d’une crise humanitaire sans précédent dans l’histoire. C’est le plus haut degré d’injustice commis par Israël : ils ciblent les écoles, les mosquées et les hôpitaux, Israël tue tout le monde, aucun endroit n’est sûr. Il ne reste plus personne à Gaza, Israël tue tout le monde. »
« Gaza est désormais un grand cimetière, ce qui se passe est de la folie, ce qui s’est passé à Deir Yassin [le 9 avril 1948, des miliciens sionistes tuent plus de 100 personnes dans un petit village palestinien près de Jérusalem. La plupart des victimes sont des femmes, des enfants et des personnes âgées] se produit maintenant, mais en pire. Les membres des enfants sont éparpillés sur le sol. »
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Ce bombardement a aussi été qualifié de « massacre » et de « génocide » par le secrétaire de l’Organisation de libération de la Palestine (OLP), Hussein al-Cheikh, selon l’agence Anadolu. Le président palestinien a déclaré trois jours de deuil.
Pour la ministre palestinienne de la Santé, Mai al-Kaila, ce bombardement est le « massacre le plus sanglant contre notre peuple ».
Dans un communiqué, elle a qualifié les « effets du massacre » d’« indescriptibles. « L’occupation [Israël] a violé toutes les lois, chartes et normes humanitaires », a-t-elle déclaré.
« Ils ont tué des patients et des civils qui cherchaient refuge à l’hôpital. » La ministre a également lancé un appel aux pays du monde entier et à l’ONU, leur demandant de « sauver notre peuple de ce génocide délibéré ».
Le secrétaire général de l’ONU, Antonio Guterres, s’est dit horrifié par la frappe contre l’hôpital al-Ahli al-Arab dans la ville de Gaza, bien qu’il se soit abstenu de rejeter la responsabilité de cette frappe.
“Les hôpitaux et le personnel médical sont protégés par le droit international humanitaire”, a écrit Guterres sur X, anciennement connu sous le nom de Twitter.
Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, s’est dit horrifié par la frappe contre l’hôpital, tout en s’abstenant d’indiquer qui était responsable de cette frappe. « Les hôpitaux et le personnel médical sont protégés par le droit international humanitaire », a-t-il écrit sur X.
Israël accuse le Jihad islamique
Sur X, l’armée israélienne a rejeté la faute sur le Jihad islamique, qui aurait raté un tir de roquette selon elle. « D’après l’analyse des systèmes opérationnels de Tsahal, un barrage de roquettes ennemies a été effectué vers Israël, qui a traversé les environs de l’hôpital lorsqu’il a été touché ».
La version originale du message incluait une vidéo de roquettes tirées depuis les environs de la ville de Gaza, mais a ensuite été supprimée par le compte.
Aric Toler, qui travaille sur les enquêtes visuelles au New York Times, a déclaré que les premières mentions publiques de l’attaque avaient eu lieu à 19 h 20, heure locale, alors que la vidéo partagée par Israël comme preuve était horodatée entre 19 h 59 et 20 h.
Le Jihad islamique a démenti, accusant Israël de « s’efforcer de se soustraire à la responsabilité du massacre commis ». « Les accusations lancées par l’ennemi sont sans fondement », a ajouté l’organisation.
Le Hezbollah a pour sa part tenu les États-Unis pour responsables, affirmant que l’attaque « révèle le véritable visage criminel de cette entité et de son sponsor… les États-Unis, qui portent la responsabilité directe et entière de ce massacre ».
Ismaël Haniyeh, le chef du Hamas, a prononcé un discours télévisé à la suite de la frappe. Il a appelé les Palestiniens du monde entier, ainsi que la communauté mondiale, à protester contre les agressions israéliennes et le bombardement de l’hôpital de Gaza.
« Dieu n’aime pas les injustes. Nous assistons à un massacre brutal et des centaines de personnes ont été tuées. Ce massacre réaffirme à quel point l’ennemi est cruel », a-t-il déclaré.
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« Ce massacre n’est qu’un parmi tant d’autres dans une séquence d’attaques sionistes… Ils commettent des tueries et des massacres sans aucun respect pour aucune loi ou valeur. Ils ont mené des attaques contre des sites sacrés. Ils ont perpétré le massacre de Sabra et Chatila [camp de réfugiés palestiniens au Liban] et en ont tué beaucoup d’autres [Palestiniens] », a-t-il ajouté.
« Les États-Unis ont couvert les massacres israéliens, ces crimes de guerre et ces punitions collectives. Les États-Unis doivent assumer la responsabilité de ces meurtres et de l’occupation. »
Le leader du Hamas a souligné : « La résistance est en cours et continue, elle ne s’arrêtera pas tant que l’occupation n’aura pas quitté nos sites et nos terres sacrés. Pour les familles des martyrs, leur sang est à nous. »
« J’appelle tous les Palestiniens, en particulier ceux de Jérusalem et de Cisjordanie, à descendre dans la rue face à l’occupation et aux colons. Nous sommes une nation, un peuple et nous serons unis. »
Protestations d’Istanbul à Idleb
À la suite de cette frappe, des centaines de personnes sont descendues dans les rues pour manifester en Cisjordanie occupée.
Des milliers de Palestiniens de Ramallah se sont rassemblés sur la place al-Manara pour dénoncer la frappe.
Des manifestations ont également éclaté dans d’autres parties de la Cisjordanie occupée, notamment à Jérusalem et à Abu Dis.
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L’Autorité palestinienne a utilisé des tirs à balles réelles pour disperser les protestataires.
Des manifestations ont aussi eu lieu à Amman, en Jordanie. Des manifestants ont tenté de pénétrer dans l’ambassade israélienne. Des informations indiquent également que certains ont allumé des incendies pendant la manifestation.
Des manifestations ont également éclaté à Istanbul en Turquie, à Idleb en Syrie et à Beyrouth au Liban.
« Il n’y aura plus de visite officielle »
Mercredi matin, le ministre jordanien des Affaires étrangères, Ayman al-Safadi, a annulé le sommet entre les dirigeants américain, égyptien et palestinien prévu ce mercredi.
Ayman al-Safadi, ministre jordanien des Affaires étrangères, a déclaré : « Nous avons été contraints d’adopter une position ferme et il n’y aura plus de visite officielle du président américain en Jordanie. »
Le ministre a confirmé que Mahmoud Abbas était retourné à Ramallah, en Cisjordanie occupée, à bord d’un avion jordanien et que Biden ne se rendrait plus dans le royaume.
« Nous avons parlé à des responsables égyptiens et américains et nous avons pris cette décision. Les États-Unis ont compris notre décision et l’ONU doit jouer un rôle pour mettre un terme à la guerre », a-t-il ajouté lors d’un entretien avec Al Jazeera. « Nous ne pouvons pas garder le silence sur ce qui se passe à Gaza, et nous devons parler à la communauté internationale et lui faire comprendre cela », a-t-il déclaré.
Le roi Abdallah de Jordanie a qualifié le bombardement de « crime de guerre odieux », soulignant : « Israël doit mettre fin à son agression brutale contre Gaza », dans une déclaration publiée sur X.
Un premier missile samedi dernier
L’hôpital avait reçu l’assurance de l’Église anglicane qu’il pouvait poursuivre ses opérations en toute sécurité après avoir reçu un missile d’avertissement d’Israël, a déclaré un représentant du ministère palestinien de la Santé lors d’une conférence de presse.
L’hôpital a été fondé en 1882 par la Church Mission Society de l’Église d’Angleterre. Il est géré par l’Église épiscopale de Jérusalem.
Selon un représentant du ministère, l’Église a appelé « toutes les organisations internationales » à cesser les bombardements après le premier coup de semonce.
L’Église a ensuite assuré à l’administration de l’hôpital qu’elle pouvait poursuivre ses opérations en toute sécurité.
“We’ve been more terrified when a missile hit the hospital on Saturday as a warning.”
Days before a major air strike, a Gaza’s al-Ahli al-Arab hospital owned by the Anglican Diocese was hit by a missile. The priest suggests it was a warning. pic.twitter.com/PtkO2wJhXQ— Middle East Eye (@MiddleEastEye) October 18, 2023
Traduction : « ‘’Nous avons été encore plus terrifiés lorsqu’un missile a frappé l’hôpital samedi en guise d’avertissement.’’
Quelques jours avant une frappe aérienne majeure, l’hôpital al-Ahli al-Arab de Gaza, propriété du diocèse anglican, a été touché par un missile. Le prêtre estime qu’il s’agissait d’un avertissement. »
Middle East Eye a contacté l’Église d’Angleterre pour obtenir ses commentaires.
Après l’attaque d’avertissement de samedi, le principal dirigeant de l’Église d’Angleterre, l’archevêque de Canterbury Justin Welby, a appelé à l’annulation des ordres israéliens d’évacuation des hôpitaux.
« Les patients gravement malades et blessés de l’hôpital Ahli, géré par l’Église anglicane – et d’autres établissements de santé du nord de Gaza – ne peuvent pas être évacués en toute sécurité », avait-il déclaré. « Ils manquent de fournitures médicales. Ils font face à une catastrophe.
« J’appelle à ce que l’ordre d’évacuation des hôpitaux du nord de Gaza soit annulé – et à ce que les établissements de santé, les agents de santé, les patients et les civils soient protégés. »
« On a vraiment l’impression qu’il n’y a plus de respect pour les structures de santé », a dénoncé Léo Cans, chef de mission de Médecins sans frontières (MSF) dans les territoires palestiniens, mardi 17 octobre sur France Info, après la destruction de l’hôpital.
#PasUneCible pic.twitter.com/tVg88sqew7
— Doctors Without Borders / Médecins Sans Frontières (@MSF_canada) October 17, 2023
« Durant l’attaque qui a touché cet hôpital, il y avait un médecin de MSF qui était en train de travailler dans le bloc opératoire », a expliqué Léo Cans, qui se dit « horrifié ».
« Depuis le début de la guerre, on voit que les hôpitaux ont été délibérément visés plusieurs fois », poursuit Léo Cans. « Rien ne justifie une telle attaque sur un hôpital. Il n’y a plus aucun avertissement dans les bombardements donc les bombes tombent. Certains hôpitaux sont en train d’opérer des patients sans anesthésie et rien ne peut justifier cela. »
Toujours ce mardi, l’UNRWA, l’agence onusienne pour les réfugiés palestiniens, a indiqué qu’au moins six Palestiniens parmi ceux qui se réfugient dans l’une de ses écoles dans le camp d’al-Maghazai avaient été tués par les bombardements israéliens.
« C’est scandaleux et cela montre une fois de plus un mépris flagrant pour la vie des civils. Aucun endroit n’est plus sûr à Gaza, pas même les installations de l’ONU », a dénoncé l’agence dans un communiqué sur X.